Exposition Antonio Saura 2011 à Nîmes / Gard
Evènement passé.
Du 23 juin au 18 septembre 2011 à Nîmes.
Antonio Saura est un peintre et écrivain espagnol né en 1930 à Huesca et décédé en 1998 à Cuenca. Atteint de la tuberculose à l'adolescence, il doit subir plusieurs opérations qui vont le contraindre à cinq années d'immobilité. Autodidacte, Antonio Saura commence à peindre et à écrire en 1947. Il réalise sa première exposition personnelle en 1950 et participe aux activités du groupe surréaliste alors qu'il vit à Paris (1954- 55). Tout au long de sa carrière, Antonio Saura voit sa pratique récompensée par une série de prix internationaux et de nombreuses expositions dans les lieux les plus prestigieux de l'art du XXè siècle.
Antonio Saura - Une chair d'ombre Melanchion III - 1988 / © Succession Antonio Saura / www.antoniosaura.org VEGAP/ADAGP-Paris, 2011
En 1990, Antonio Saura est fait Officier de l'Ordre des Arts et des Lettres. Cette même année, Le Musée d'Art moderne de Lugano organise une rétrospective de son oeuvre picturale réalisée entre 1948 et 1990. Sa dernière exposition a lieu en 1997, un an avant sa mort, à la Galerie Lelong à Paris où plusieurs grands formats, portraits et autoportraits seront présentés. Antonio Saura a défini et commenté chacun des thèmes qui composent son oeuvre picturale et les a répertoriés sous la forme d'un registre publié en 1992 ayant pour titre Note book (memoria del tiempo). L'oeuvre imprimée a fait l'objet d'un inventaire en 1984, puis d'un second en 2000.
Directeur de la célèbre imprimerie parisienne, M. Christian Bramsen a, le temps de cette manifestation, prêté à l'école les lithographies du peintre espagnol issues de la collection des Archives de l'Atelier Clot Bramsen & Georges. 104 lithographies, soit l'intégralité de la collection des archives, sont présentées tout l'été, dans les salles d'exposition de l'Hôtel Rivet, un ancien hôtel particulier qui abrite aujourd'hui l'école. Les oeuvres présentées sont le fruit d'une collaboration longue de plus de 30 années entre Antonio Saura et le père de Christian Bramsen, le lithographe Peter Bramsen.
"Pour Peter Bramsen", par Antonia Saura
Derrière le porche de l'entrée avec sa bête à cornes éternellement destinée au centre de l'Amérique, une fois franchie la porte transparente, apparaît, la grande salle de machines noires, aquarium, fanal, fabrique toujours grise dans la mémoire. La disposition des espaces ne répond pas à des normes orthodoxes. A gauche de l'entrée, la grande table des repas fraternels, des libations abondantes et de la signature des papillons multiples. Sur le mur, au-dessus de la table, ont été épinglées des cartes postales et coupures diverses, butins hasardeux obtenus dans les rares escales au cours des longues traversées. A droite, une petite cuisine où très souvent le commandant, comme le navigateur solitaire qu'il continue à être, officie.
Ce n'est pas tous les jours que l'on nourrit l'équipage uniquement avec de la viande salée. Le voilier ventru des rêves de fuite, de salpêtre et de vent fort, mentalement enfermé dans l'oscillant et apparemment fragile hangar de cristal où la roue de la presse évoque légèrement la roue du gouvernail, est à présent propulsé par les fragiles papillons de papier coloré réalisés sous les conseils du géant barbu. Il y a des cabines ouvertes où les marins travaillent, et au fond de la cale des espaces et des recoins perdus où l'eau flotte à profusion.
A gauche de la grande salle des machines - il s'agit d'un voilier, et les étranges engins ne produisent qu'une énergie diffuse et hasardeuse propulsant instincts et répétitions fossiles, désirs et surprises -, se trouve la cabine du capitaine Nemo, fermé à clé et avec des tiroirs remplis de trésors marins, captures accumulées, triomphes et désertions, couleurs et tatouages, dominée par la présence insidieuse, acide et solaire du grand troll déjà disparu. Le Calmar géant, le mystérieux Orient-Express, le Grand d'outremer, le Hollandais errant, l'Ange, le Ramollisseur, la Taupe mentale, le Serpent infaillible, le Corsaire noir, le Saurien à la jambe de bois et le Gitano Señorito, furent quelques-uns des marins présents dans le souvenir lors des cinglages longs et inégaux.
Pendant plus d'un an, dans le grand voilier de cristal, j'ai eu l'honneur de travailler sous les ordres du commandant grand et généreux, d'assister aux matins troubles et aux crépuscules splendides. Dans le travail difficile de tant de mois, nous avons vu éclore les quatre saisons, les jardins des nations, des tempêtes d'acide et d'encre, des monstres difformes, des multitudes abyssales, des images dépourvues de centre et des centres entourés de ténèbres.
Nous avons assisté à des abordages et à des sauvetages, rendu des hommages et évité des pirates. Jeté par-dessus bord des cadavres inachevés, envoyé des lettres à Mexico affolant les philatélistes et déposé dans la Mer des Sargasses des messages en bouteille, adressé à plusieurs ancêtres très chers d'autres latitudes. Dans la rose des vents, nous avons prophétisé le savoir calciné du futur. Dans le livre de bord de la longue traversée nous avons ancré à jamais les aiguilles de la boussole orientées très précisément vers le nord et vers le sud, deux points fixes de la constante amitié, le refuge chaleureux des marins à terre.
Exposition Antonio Saura
Du 23 juin au 18 septembre 2011
Hôtel Rivet
10 Grand'Rue
30000 Nîmes
Tél : 04.66.76.72.12